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lundi 21 octobre 2013

boiseries-Eric Bourgoin-Bourgogne

Les travaux sont annoncés pour début novembre.
Dans l'alcôve de la "tour des neiges" des boiseries anciennes (cf mon article sur les lambris) seront ajustées avec des boiseries neuves en peuplier et en hêtre.

alcôve avant les transformations… finalement ce n'était pas si mal !

Je rends visite à Eric Bourgoin notre ébéniste formé à l'école Boulle.




Véritable passionné… qui n'a pas hésité à prendre le chantier en main 


les parcloses neuves sentent bon le peuplier


au fond un panneau ancien qui a servi de modèle



en attendant une journaliste et un photographe viennent prendre des clichés et nous interviewer pour un article  à paraître en janvier… sur "la tour des neiges"…l'aquarelliste et son cuisinier…


Pour nous rétablir, j'ai concocté
des tourteaux à la "Grandmaison", une assiette de bouffis arrivés de Dieppe en charette, des cailles  au chou de Vendée,  un soumaintrain fermier et des coings de Monéteau au vin rouge et à l'amande








samedi 12 octobre 2013

Auxerre-Crabe-Jean-Pierre Soisson-Jacques Amyot-Vilmorin


Vous avez probablement du mal à comprendre un pareil titre…et pourtant 



Céline habillée par Gudrun, Gudrun mode venue du nord qui a le vent en poupe en ce moment


vit à Auxerre dans une vieille demeure du quartier de la Marine


Olivier, son mari,  est en pleine réflexion… avant de passer à l'improvisation


pour préparer un déjeuner digne des convives parmi lesquelles  Danièle Bour, dessinatrice et créatrice  de Petit Ours brun


venues fêter l'anniversaire de Céline

au menu… quatuor de tourteaux à la Grandmaison, coq de Tangy au Saint-Chinian


et voilà, tout y est, les assemblages de saveurs de multiples épices, l'harmonie des couleurs, le goût de la présentation


sous l'oeil amusé du renard qui n'a jamais vu ça


Maître Goupil n'en revient pas, mais où va-t-il chercher tout ça ? Des roses avec des tourteaux…


Après les agapes, Olivier invite son beau-père Louis, photographe et publiciste de renom, à visiter la nouvelle exposition pour le 500ème anniversaire de la naissance de l'évêque et homme de lettre Jacques AMYOT à l'abbaye Saint-Germain.


on lui doit les traductions de Plutarque et surtout l'évolution de la langue française. il influença plusieurs générations d'écrivains dont Montaigne qui lui rend un chaleureux hommage dans ses "Essais". Il fut le précepteur de Charles IX et d'Henri III. Pie V le nomme évêque d'Auxerre. 


Jean-Pierre Soisson, historien, dont son dernier ouvrage porte justement sur  l'helléniste et éminent successeur de saint Germain, présentait avec Françoise Duvernier bibliothécaire le fruit de leurs recherches à Messieurs le Préfet, le Président du conseil général de l'Yonne et le député de la circonscription. 


un public attentif accompagnait les autorités


le cliché de notre photographe Louis Bour est exceptionnel, véritable portrait qui traduit toute l'intelligence de celui qui fut maire d'Auxerre, député de l'Yonne, ministre d'Etat, Jean-Pierre Soisson


Vint le temps des discours officiels …


le lendemain nous visitions au musée d'histoire naturelle une exposition sur les variétés de légumes sélectionnées par Vilmorin pour leur qualité gustative, leur aspect ou leur taille…


à voir à Auxerre ces jours-ci
Voici donc comment un week-end à Auxerre peut-être riche. Il y en a pour les yeux, les papilles et l'intellect…
Vive Auxerre




vendredi 11 octobre 2013

Lambris en grisailles d'époque Louis XV à Auxerre

Des vacances dernières, la découverte de lambris peints d'un camaïeu bleu restera le fait marquant.

Provenant d'un hôtel sis face à la Seine, à Bray (entre Provins et Sens), ces lambris faisaient le désespoir d'une charmante antiquaire qui les avait sauvés d'un funeste destin mais ne savait où ils pourraient bien aller.
En août dernier à la foire de Mézilles (Yonne), j'en devenais le propriétaire et pour rassurer l'antiquaire lui priais de venir les déposer à la tour des neiges pour voir leur nouvel environnement.
En fin d'après-midi, dans le jardin à Auxerre, tout en sirotant un chablis, elle m'expliquait que ces lambris avaient été arrachés des murs d'un bel hôtel d'époque Louis XIV par les nouveaux acquéreurs qui firent table rase des "vieilleries" pour aménager un "loft"design. Triste époque… mais par cette opération je m'engageais à les sauver bien que convaincu de ne pouvoir les rétablir dans un aussi bel écrin que le leur quelques mois auparavant. Les meubles doivent accepter de tels sacrilèges !

Installation provisoire en attendant que notre ami ébéniste Eric Bourgoin, ancien élève de l'école Boulle, installé à Joigny, vienne poser des boiseries complétant le grand panneau et deux parcloses de Bray-sur-Seine. 

Le premier panneau en peuplier dans un chassis Louis XV mesure 1m30 de hauteur et 0m73 de largeur. Scène champêtre sur la côte. un fleuve côtier défile devant nous et s'éloigne vers l'horizon marin. Une ferme et sa dépendance sont installées au bord de la rivière. Tout est calme.

La rivière coule paisiblement. Un pont en bois ou une simple passerelle sépare l'espace marin au fond de l'embouchure  du cours d'eau. 

 Cette masure est évidemment modeste bien que percée de plusieurs ouvertures. Pas de vantaux apparents, sans doute la fermière se contente-t-elle de poser le soir des volets pour se protéger des bestioles curieuses ou attirées par une maigre lueur. Le toit de chaume est coiffé d'une cheminée au repos… c'est l'été comme l'indique la végétation.
à l'arrière… une grange ou étable avec des excavations dans le pignon qui pourraient correspondre à des perchoirs pour les poules…

La frondaison des hêtres majestueux protège la bâtisse du soleil brûlant

d'un pas lent… mais rien ne presse, une vache suivie de son maître regagne son étable. Elle paraît petite mais l'amélioration des espèces tant espérée par les physiocrates n'a des effets en France qu'à la toute fin du XVIIIe siècle. Il ne faut pas forcément y voir un jeu de perspective trop vite qualifié de maladroit.  

De sa queue, elle chasse les mouches insistantes…la tête relevée elle cherche le gîte et non plus l'herbe grasse dont elle s'est repue toute la journée. 

Quant au berger, il semble avoir pris froid. légèrement courbé, se moucherait-il ? L'index sur une narine,  il soufflerait fort de l'autre. Le bâton est en suspension alors qu'il continue de marcher… Scène intime… 

une végétation suggestive, posée ici et là pour indiquer que nous sommes dans un cadre naturel, mais trop parsemée pour être réaliste… L'artiste est pressé. Il ne dort que quelques nuits à Bray-sur-Seine avant de gagner Sens ou Troyes ou Nevers. Il ne peut pas entrer dans le détail. Sait-il seulement faire autre chose ?

Au dessus de la cime des arbres, passent quelques oiseaux…
canards, cormorans ou corbeaux ?
Le deuxième panneau était un trumeau de cheminée ( 0m63 x 1m23)

En fond, un paysage urbain:  la forteresse avec sa porte est finalement étouffée par les faubourgs qui l'entourent. Donjon à gauche, porte coiffée de deux tours, château au double toit surplombant la ville.

Edifice religieux comprenant à gauche les communs, l'hôtellerie, le dortoir, une tour-escalier de service, un clocher et la nef de l'église.

Enfin ces constructions qui bordent les axes majeurs conduisant à la vieille ville et constituent les faubourgs.

Ce paysage urbain est serti par l'eau à ses pieds et la table du pont au dessus des toits. Ensemble bien cadré animé par des petites embarcations utilitaires (pêche, bac de traversée).

un pêcheur assoupi ou préparant son filet

Ce dernier brandit fièrement une tanche ou une alose. Il l'avait repérée depuis longtemps, elle a fini par mordre.

Un batelier conduit un homme pressé bien enveloppé dans sa cape pour se prémunir contre l'humidité ou la fraîcheur matinale.

Au loin, un homme pousse à l'aide d'une perche en aubier une petite plate.

Une végétation luxuriante borde de part et d'autre ce paysage d'eau.

Là encore, une végétation suggestive

renoncules ? symbole de la séduction

ancolies ?

un chemin bordé de taillis soignés

Enfin une série de personnages animent la scène. Ici un homme d'arme, au chapeau à panache et ruban, mousquet à l'épaule

Un clerc juché sur un âne  part rendre visite à un malade ou quitte contre son gré la ville pour regagner sa chapelle en rase campagne

Porteur au pas lent prenant appui sur son bâton pour soulager sa peine et gravir plus facilement le pont.

Et pour finir au premier plan un bourgeois qui prend plaisir à venir pêcher

Peut-être allusion au commanditaire qui dans ses temps perdus vient flâner au bord de la Seine pour taquiner le goujon. Sa tenue évoque la fin du XVIIe siècle.

au dessus de ce microcosme

s'agitent de grands oiseaux


Le prieur de la Bourse, gentilhomme dont le portrait au pastel a été dressé quelques années après (1745) regarde ce nouveau décor installé dans le salon de la tour des neiges à Auxerre.

Nous ne pourrons connaître le nom du mécène ni celui de l'artiste peintre. Par le trait qui rappelle les carreaux flamands, il est tentant d'attribuer ce décor à un peintre hollandais qui en déplacement pour une destinée plus ou moins lointaine (un chantier dans un château bourguignon ou un voyage initiatique en Italie) a besoin de financer son voyage par de petits travaux sur la route… Mais, il peut s'agir plus probablement d'un peintre de l'un des nombreux ateliers de faïence de Nevers. Le contour des maisons, le feuillage, le pont sur la rivière, rappelle tout à fait certains décor de la faïence bleue de Nevers de la même époque. L'artiste est donc en déplacement pour une raison inconnue entre Provins et Nevers, sans argent, il a très bien pu réaliser cette peinture à la main levée, réalisant en grand ce qu'il était habitué à faire en petit. Si bref soit le passage, il faut malgré tout faire de la surface. Le trait est rapide, la couche picturale fine. L'artisan a la main sûre, le poignet souple, le bras léger. Pas d'arthrose pour un jeune gaillard qui a remonté la Loire en gabarre de Nevers jusqu'à Gien et gagner ensuite Sens et Provins en voiture. Le trait rapide des artistes nivernais notamment pour le tracé des maisons  rappelle celui de l'illustre inconnu de ces lambris. 
jardinières de Nevers début XIXème siècle



La main de l'artiste pourrait être encore plus prestigieuse. Les décors sont assez proches de ceux des lambris de la pharmacie de l'Hôtel Dieu de Carpentras attribués  à Joseph Siffred Duplessis (1725-1802), peintre carpentrassien, portraitiste du Roi Louis XVI ou à  son père Joseph-Guillaume. (cf site de l'office de tourisme de Carpentras). Similitude des thèmes rousseauistes (paysages arborés, rivières, architectures, promeneurs, pêcheurs…) et similitude du traitement de la frondaison des arbres. 

Les accolades du châssis, la proportion des bois montrent que l'art des boiseries a atteint au début du XVIIIème siècle une grande maîtrise. Le goût pour les camaïeux bleus est également caractéristique des premières années du règne de Louis XV… Ces peintures ont miraculeusement été épargnées des différentes modes. Beaucoup d'entre elles ont été décapées pour revenir au bois naturel ou pour être repeintes en blanc du Roi. Les lambris sont aujourd'hui posés pour au moins un siècle j'espère, dans une ancienne demeure qui à l'époque de leurs réalisations appartenait à Nicolas Cochois, un Auxerrois ayant fondé sa fortune sur le vin auxerrois et le commerce sur Paris. Les tentures vertes renseignées dans l'inventaire de 1769 de la veuve cochois ont laissé place aujourd'hui aux lambris en grisailles. Pas d'injure au temps, le salon d'antan retrouve une nouvelle vie en se revêtant de bleus et de gris.